Redoutable, La Bourse poursuit son chemin

Le romancier Sébastien Lapaque a publié une recension de La Bourse dans Le Figaro du 4 février 2010. Il a très justement relevé la rareté d'un texte encore méconnu en France et il a été sensible au ton tranché qu'adopte Weber dans cet essai.

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La Bourse, vue par le sociologue Max Weber.
Quatre mois après la réédition d'extraits choisis du Manuel du spéculateur à la Bourse de Pierre-Joseph Proudhon (Éditions Ère), voici une autre redécouverte. "Bien peu savent que Weber a écrit sur les marchés financiers", observe Pierre de Larminat dans son introduction. Weber n'est pas Proudhon : son intention est moins polémique. Dans cet ensemble de textes des années 1894-1896, le jeune professeur d'économie de l'université de Fribourg-en-Brisgau présente le fonctionnement des marchés financiers en respectant déjà ce qu'il appellera la "neutralité axiologique" dans Le Savant et le Politique. Il ne fait pas de morale, il étudie comment tourne la machine en rappelant aux "spéculateurs dépourvus de moyens" que c'est un redoutable corral où il n'est pas nécessaire de s'aventurer. "La Bourse est le monopole des riches", insiste-t-il en des termes qui ont le mérite d'être clairs.

par Sébastien Lapaque
Le Figaro - 04/02/2010

Je ne partage pas totalement l'avis de S. Lapaque concernant l'absence d'intention polémique de La Bourse. Je crois au contraire que c'est précisément un texte engagé dont la vigueur reflète la vivacité des débats sur la législation boursière qui ont incité Weber à le rédiger. "Etudie[r] comment tourne la machine" selon le point de vue de la neutralité axiologique est une opération symbolique qui sert une position politique nationaliste. C'est la position de puissance de l'Allemagne qui importe à Weber. A ses yeux, les autres problèmes, comme les déconvenues des "spéculateurs dépourvus de moyens", sont secondaires quand ils sont mesurés à l'aune de ce critère d'appréciation. Weber assume cette relation entre le métier de savant et l'action politique. Il la théorise dans la leçon inaugurale qu'il prononce en 1895.